Km 12 223
Dimanche 28 octobre
Lorsque nous quittons Alice Spring il fait 11°C. La nuit a été très fraîche mais, sachant que sous ces latitudes l'amplitude thermique peut être importante, nous nous habillons léger plus polaire au cas où... Un couple d'oiseaux noirs et blancs nous dit au revoir en chantant.
Nous nous dirigeons vers les East Macdonnell Ranges. La plupart des touristes visitent surtout la partie ouest. Nous, non. Ne me demandez pas pourquoi...
Premier arrêt, Emily Gap, site sacré des Aborigènes. C'est ici que des ancêtres chenilles seraient apparus et auraient ramper pour donner au paysage l'aspect qu'il a aujourd'hui. La gorge est étroite, bordée de falaises rouges impressionnantes. Une nuée de loriquets qui passent à toute allure rajoute des éclats métalliques verts à la paroi ocre qui rutile déjà au soleil levant dans un ciel turquoise. En avançant dans la gorge, le regard est vite attiré par des peintures aborigènes représentant les trois chenilles.
Deuxième arrêt, Jessie Gap. Une gorge qui n'a rien à envier de sa beauté à la précédente. On y voit encore une représentation des chenilles. Nous prenons là encore un cours de géologie grandeur nature.
Troisième arrêt, Corroboree Rock. Des panneaux invitent les visiteurs à respecter cet autre site sacré des Aborigènes comme on le ferait pour n'importe quel site religieux. Ce qui pour ma part ne pose aucun problème. Quand on est là, une part de soi dont on ignorait l'existence, s'extirpe et s'avance vers cette indéfinissable chose qui irradie de ce rocher. L'impact laissera des traces...Aurai-je des ascendances aborigènes ? Ce roc est de plus associé au Parentie Dreaming. Ce varan peut atteindre plus de 2m de long. Nous l'avons cherché malheureusement sans succès.
La route, à la fin non goudronnée, nous mène à notre dernier arrêt : la gorge de Trephina. Pendant plus d'une heure nous avons marché sur les bords de la falaise. Vertigineux, grandiose, magnifique ! Il ne faisait pas trop chaud. Le temps idéal pour gravir des escarpements toujours ocres. Dans les déserts, les rivières à sec continuent de couler. L'eau est partout sauf qu'on ne la voit pas. "Le désert est beau parce qu'il cache un puits quelque part". Les êtres qui vivent là savent la détecter et la capter, c'est toute la différence.
Ensuite, à plus de 450 km de là, un autre roc nous attendait...depuis si longtemps...
Lundi 29 octobre ULURU
Par le biais de revues, émissions télévisées, films ou cartes postales, tout le monde "connaît" Uluru et a dit : Wouah ! face à l'image. Cet impact visuel est si important qu'un flux planétaire régulier de curieux converge depuis toujours vers ce monolithe. Depuis hier c'est notre tour.
On l'aperçoit bien avant d'être sur le site et l'"image" est bien celle qui nous est "familière". On a juste envie de "voir" de plus près, d'assister au coucher de soleil comme nous l'avons fait dès notre arrivée tardive. Alors on se rapproche et progressivement tout change. RIEN ne ressemble à ce qu'on croyait. C'est un dôme mouvant en formes et en couleurs. De loin, il apparaît très long et aplati. Au fur et à mesure qu'on s'en approche il se comporte comme le soufflet d'un accordéon auquel il ressemble par les nombreux plis qui le parcourent comme le ferait des ondes sur l'eau, il raccourcit et malgré tout devient très imposant car on le voit plus immense. C'est un spectacle vivant qui se joue sous nos yeux. Alors on fait comme tout le monde, on se tait et on regarde, incrédule. Et le soleil s'abaisse à l'horizon pendant que des nuages légers l'encombre et Uluru ondule du gris au bleu violet en passant par toute la gamme des rouges ocres oranger. Uluru danse dans le soleil couchant...
Au bout d'un long moment on se prend mutuellement en photo pour fixer la magie d'un tel moment. Mais Uluru ne se laisse pas mettre en cage. On s'attarde alors aux détails, on remarque des traînées noires, des cascades de trous et des formes étranges...et puis il faut rentrer le soleil est couché et Uluru s'éteint, s'endort...jusqu'à demain.
Demain, c'était ce matin. Chaussures de marche, sacs à dos avec fruits secs, eau. Il fait 19°C à 7h 30. Le vent s'est levé et moi j'ai mis la polaire. Les TitouTitoune s'apprêtent à contouner le monstre le long de ses 12 km de circonférence. La motivation c'était aussi la performance physique (après des km en voiture) mais lorsqu'on n'est plus qu'à quelques mètres de la chose, c'est tellement énorme, impressionnant que ça vous couche. Bien sûr, on ne le fait pas parce qu'il y a du monde encore que...j'ai ressenti si fort le besoin d'un contact physique ! Titou, vous le connaissez...Ne dit mot mais n'en pense pas moins. L'Européenne culturée (le mot n'existe pas mais je trouve qu'il est approprié) que je suis, doublée de quelques rudiments scientifiques et d'une certaine rationnalité a tout laissé tomber. Uluru ça ne s'étudie pas, ça se perçoit et celà nous a rendu heureux. Pour le peuple aborigène c'est un livre ouvert. Pour la nature environnante c'est un collecteur d'eau. Comme tout est lié! Comme Uluru doit être beau sous la pluie avec des cascades qui ne sont plus matérialisées en ce moment que par les traînées noires dûes à des algues microscopiques qui attendent de renaître.